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philippelenoir-popculture.com

Journaliste professionnel, je propose ici de partager avec vous mes coups de coeur, mes avis et ma passion pour la culture populaire sous toutes ses formes.

Vittorio de Sica, un enchanteur italien, fer de lance du néoréalisme et mentor de Sophia Loren

Vittorio de Sica, un enchanteur italien, fer de lance du néoréalisme et mentor de Sophia Loren

La Cinémathèque propose du 29 janvier au 2 mars une vaste rétrospective consacrée à Vittorio de Sica portée par une intégrale de ses films comme réalisateur. Car le Napolitain exubérant fut également un acteur très populaire en Italie où il tourna pas moins d'une centaine de films. C'est sans doute cette double carrière qui jette aujourd'hui la confusion sur un artiste que les cinéphile adulent surtout pour ces quatre chef d’œuvres de la période néoréaliste. Il faut bien avouer que c'est le sommet d'une carrière qui se révèle vaste, éclectique et du coup un peu inégale. Sa postérité s'en ressent quand on la compare à celle des maîtres de l'âge d'or du cinéma italien, notamment les intouchables que sont Roberto Rossellini, Luchino Visconti, Federico Fellini ou Michelangelo Antonioni auxquels on peut ajouter désormais Sergio Leone. Sa réputation de séducteur hédoniste qu'il incarna à l'écran comme à la ville n'est sans doute pas étrangère à cette relative déconsidération. Pourtant, avec quatre Oscars, une Palme d'Or et un Ours d'Or sans oublier l'Oscar de la meilleure actrice pour Sophia Loren, Vittorio de Sica, s'impose bien comme un artiste d'exception qui aura fait rayonner le cinéma italien à travers le monde. Voici donc notre sélection de cinq films auxquels il faut rajouter Sciuscià (1946), évocation poignante de deux enfants placés dans une maison de correction et Le Jardin des Fizzi-Contini (1970) chronique élégante, lumineuse, mais dramatique de la montée du fascisme vue par des aristocrates juifs.

http://philippelenoir-popculture.com/2019/07/sophia-loren-retrouve-les-plateaux-de-cinema-nos-cinq-films-preferes-de-la-divine-italienne.html

Vittoria de Sica

Vittoria de Sica

Le voleur de bicyclette 1948

Vittorio de Sica, un enchanteur italien, fer de lance du néoréalisme et mentor de Sophia Loren

Le film le plus célèbre de Vittorio de Sica, un chef d’œuvre absolu du mouvement néoréaliste. Le réalisateur à qui Hollywood fait les yeux doux, préfère par conviction tourner ce film avec des moyens dérisoires pour témoigner de la misère de l'Italie de l'après-guerre. Le film raconte l'errance d'Antonio, accompagné de son fils, qui recherche le vélo qu'on lui a volé. Ce vélo qui lui avait permis de décrocher un travail de colleur d'affiches et qu'il doit absolument retrouver au risque de retourner au chômage. Tourné dans les rues de Rome, le film s'attache surtout à montrer le dénuement des habitants au cours d'une seule et même journée. La chronique sociale s'y montre réaliste, sans misérabilisme mais assez caustique puisqu'elle montre que les pauvres se volent entre eux pour survivre. La mise en scène suit au plus près le père et le fils dans leurs relations de tendresse et de solidarité. A l'instar de Chaplin, Vittorio de Sica apprécie les effets mélodramatiques, notamment lors d'un dénouement bouleversant qui a fait pleurer des générations de cinéphiles depuis des décennies. Un film incontournable de l'histoire du cinéma, un classique indémodable, un monument de simplicité...

Miracle à Milan 1951

Vittorio de Sica, un enchanteur italien, fer de lance du néoréalisme et mentor de Sophia Loren

Vittorio de Sica, après le succès international du Voleur de Bicyclette est sacré chef de file du néoréalisme. Mais l'artiste est un poète humaniste qui cherche déjà à s'affranchir du dogme avec ce film qui s'affiche comme un conte féerique, toujours sous l'influence de Chaplin. Pourtant le réalisateur conserve bien une part de vérité documentaire dans sa description du petit peuple italien vivant dans une sorte de bidonville à l'écart de la grande ville. Le film démarre, c'est vrai, par la naissance d'un bébé dans un chou et se conclue par un ballet aérien des miséreux au-dessus de la cathédrale de Milan. De Sica élabore un film joyeux dans lequel ce garçon né dans un jardin devenu jeune homme, produit une série de miracles qui rendent plus heureux les habitants du bidonville. Mais sous l'aspect bienveillant, le réalisateur décrit que le matérialisme est un phénomène qui altère toutes les classes sociales... Sans aucune doute le film le plus joyeux du néoréalisme italien qui donne le sourire et rend espoir en un avenir meilleur.

Umberto D 1951

Vittorio de Sica, un enchanteur italien, fer de lance du néoréalisme et mentor de Sophia Loren

Le dernier chef d’œuvre de Vittorio de Sica et à coup sûr son plus émouvant. Après avoir ouvert sa période néoréaliste avec sa description de l'enfance bafouée dans Sciuscià, il l'achève en portant son attention sur un professeur retraité dont la maigre pension ne lui permet plus de payer son loyer. Le réalisateur montre à quel point la vulnérabilité du grand âge est traitée par le mépris dans une société moderne qui voue un culte à la jeunesse. C'est bien le film le plus sombre de son auteur qui suit la dérive solitaire d'Umberto. Seul son chien ne juge pas son dénuement et lui permet encore de sourire par intermittence. Néanmoins, si le film aborde sans détour l'hypothèse du suicide du vieil homme, De Sica en humaniste bienveillant lui offre une issue de secours provoquée par son compagnon à quatre pattes. Contre toute attente, le film soulève une vive protestation du gouvernement qui met tout en œuvre pour qu'il n'obtienne pas de récompense au festival de Cannes. Le réalisateur est accusé de saper le moral d'un pays en reconstruction par son regard misérabiliste et populiste. De Sica comprend qu'il est temps pour lui de tourner la page la plus créative de son cinéma. Umberto D est son chant du cygne néoréaliste mais aussi son film le plus visionnaire en ce qu'il montre la vieillesse comme la pire des tares.

La Ciociara 1960

Vittorio de Sica, un enchanteur italien, fer de lance du néoréalisme et mentor de Sophia Loren

Adapté d'un roman d'Alberto Moravia par Cesare Zavatinni, le scénariste inspiré de la veine néoréaliste de Vittorio de Sica, le film est un véhicule en or massif pour Sophia Loren de retour au pays après une parenthèse hollywoodienne somme toute décevante. La star glamourisée par les Américains renoue avec le personnage qui fit sa gloire : la fille du peuple belle et revêche face aux événements. Sophia Loren s'y montre en effet percutante en Mère Courage qui se réfugie à la campagne avec sa fille à l'heure où le régime fasciste vacille face à l'avancée des troupes américaines. De Sica a abandonné la veine documentaire, mais assure une approche naturaliste qui convient à son actrice dont il sera désormais le mentor, la dirigeant dans sept films. Le film est dans ses deux tiers une chronique paysanne qui dépeint avec justesse une Italie rurale dont les habitants sont dépassés par la chute d'un fascisme qu'ils ont soutenu. Le dernier tiers sombre dans le drame pour mieux dénoncer la saleté de toutes les guerres. C'est le film de la consécration pour Sophia Loren qui décroche un Oscar historique pour une actrice européenne dans une production non-anglophone. On en oublie la présence de Jean-Paul Belmondo en jeune intellectuel anti-fasciste dans un rôle tout en nuances.

Hier, aujourd'hui et demain 1965

Vittorio de Sica, un enchanteur italien, fer de lance du néoréalisme et mentor de Sophia Loren

L'Italie des années 60 est le pays des films à sketchs qui donnent des résultats plutôt inégaux. Celui-ci a l'avantage de la cohérence d'un seul réalisateur qui met en scène le couple le plus populaire de la péninsule, Marcello Mastroianni et Sophia Loren au somme de leur beauté respective. Les trois segments se déroulant à Naples, Milan et Rome permettent de donner une image assez juste du pays en pleine révolution pop où sexe, religion et famille connaissent de profonds bouleversements. Le réalisateur montre à quel point l'Italie n'a guère de cohésion, surtout entre Naples la cité populaire et rebelle au changement et Milan la métropole bourgeoise en quête de modernité. Du coup, Rome s'affiche comme la plus consensuelle, symbolisée par le voisinage entre une prostituée accorte et un beau séminariste. Là encore le film est voué à la gloire de Sophia Loren qui symbolise comme jamais toutes les femmes italiennes, tout du moins dans l'imaginaire collectif. A ses côtés Marcello Mastroianni cabotine à merveille s'amusant de la réputation de l'Italiano vero. Le film est d'autant plus célèbre qu'il est marqué par une séance de strip-tease irrésistible d'humour et de glamour. Un film vraiment épatant, jubilatoire, symbolisant à merveille l'Italie de son époque.

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